Alors que le Rotary célèbre le 24 octobre la Journée mondiale contre la polio, les membres savent que, même face à une pandémie, l’important travail d’éradication de la polio doit se poursuivre. Plus que jamais, le soutien détours est nécessaire pour gagner le combat contre la maladie partout dans le monde. Or, tant que la polio ne sera pas complètement éradiquée, le risque de résurgence planera toujours sur les populations insuffisamment protégées en raison de l’absence de vaccination de routine nécessaire. « À titre d’exemple, récemment, bon nombre de programmes de vaccination pédiatrique de routine ont été interrompus ou perturbés par la pandémie deCOVID-19. Il est essentiel de rattraper notre retard pour empêcher une augmentation du nombre de cas dans de nombreux pays du monde », explique Emmanuel Vidor, Expert Médical mondial de la Polio chez Sanofi Pasteur. Malgré la certification par l’OMS de l’éradication du virus sauvage de la poliomyélite en Afrique, la maladie est repartie à la hausse – 423 cas à fin août –, profitant de l’arrêt des vaccinations durant la pandémie de Covid-19, écrit on.
Juin 1959
Une chaleur accablante s’abat sur la ville de Montréal et des conversations concernant la maladie infantile appelée « poliomyélite »s’intensifient dans les hôpitaux de la région. Je suis alitée depuis une semaine et mon médecin m’a prescrit la dose maximale d’aspirine. Mon corps est douloureux et je ne suis pas bien du tout. Ma sœur qui est à mes côtés semble moins souffrante. Le docteur est rassuré et pense que nous avons attrapé une grippe suite à notre baignade à Pointe Calumet la fin de semaine précédente. Des amis nous y avaient amenés pour la première fois et nous avions vraiment apprécié notre sortie. L’eau était agréable et nous soulageait. Papa et Maman s’étaient baignés eux aussi .Après une longue semaine de doutes, Maman décidait de m’amener à l’hôpital Sainte-Justine en taxi. L’urgence était remplie, des enfants toussaient, pleuraient et l’attente dura 8 longues heures lorsqu’on prononça mon nom. Dès le premier diagnostic, on déclarait que c’était bien les symptômes de la polio. Je ne pouvais plus baisser la tête et regarder le bout de mes chaussures. Je devais avoir une ponction lombaire. Moi qui n’ai jamais connu ça, je vous avoue encore aujourd’hui, ne plus vouloir passer par là ! Je n’ai pu m’allonger sur le dos pendant quelques heures. On m’hospitalisa comme bien d’autres enfants, mais il n’y avait plus de places dans les chambres à l’étage. Je passai plusieurs heures dans un corridor. Je me suis mise à compter les tuiles au plafond pour me calmer et me distraire, car cette situation me stressait au plus haut point. Mes parents s’inquiétaient. Nous étions au pays depuis 5 ans seulement et nous avions peu d’amis vers qui nous tourner. Un immigrant demeure un immigrant pendant de très nombreuses années. Il se sent plus désarmé lorsque la maladie frappe un des siens.
En l’espace de 24 heures, la paralysie s’installa du bout de mes orteils au début de mes poumons. Vu que la fièvre montait, on avisa mes parents que je devrais certainement être installée dans un poumon d’acier pendant la nuit. Par contre, si la fièvre augmentait beaucoup trop, il était possible que je décède et les spécialistes avisèrent ma mère de cette grande éventualité. J’avais 9 ans et ma sœur 6ans. Maman annonça la mauvaise nouvelle à ma sœur Maggy et envoya un télégramme à mes grands-parents. Mon grand-père paternel promit de prier pour ma guérison. C’était un moment très douloureux pour mes parents quine connaissaient pas cette maladie infantile. J’avais le Bon Dieu pour moi, car ma fièvre baissa de façon significative quelques heures après mon hospitalisation. Par la suite, je fus installée dans une grande chambre avec d’autres enfants. Je me souviens encore de cette petite fille de 5 ans, alitée, paralysée et qui chantait sans arrêt. Sa jolie voix remplissait notre chambre dortoir. Elle n’avait aucune chance de guérison. Je le sus plus tard. Cette nouvelle m’affecta et je me souviens que j’avais envie de pleurer.
J’ai eu maintes injections et j’avais à l’époque une peur terrible des piqûres. Un soir, alors qu’on m’avait promis qu’on arrêterait les injections, je fus doublement frustrée quand un infirmier arriva avec son plateau de seringues. Je me rappelle avoir envoyé en l’air le fameux plateau qui a atterri sur le sol. Je n’ai jamais recommencé. On tâcha de me raisonner en me disant que mon état se détériorait à nouveau et qu’il fallait renouveler le traitement pendant plusieurs jours. À 9ans, on ne pense pas comme une adulte, mais je devais me soumettre à ce changement et puis, je l’avoue, les garde-malades, les sœurs grises étaient aux petits soins avec moi.
J’ai prié, très prié dans les pires moments. Je voulais marcher à nouveau. Je suis sortie de Sainte-Justine dès le début septembre. J’ai porté des chaussures lacées, très lourdes par la suite, car je ne savais plus marcher comme il faut. On m’a inscrite à des cours de natation et après quelques mois, je pouvais remarcher comme avant ou presque malgré la fatigue qui demeurait et la grande anxiété qui s’accaparait de moi. À chacune de mes visites à la clinique, le Dr Paquet m’appelait sa miraculée…
Aujourd’hui, à 71 ans et demi, je me considère comme une SURVIVANTE et je dois toute ma reconnaissance à ceux et celles qui m’ont soignée.
À l’heure de la Covid 19, j’encourage les gens de se faire vacciner. N’ayez crainte, la science a évolué et vous évitez ainsi de contracter la maladie à risque. Je suis doublement vaccinée et je suis fière de l’être !
La vie ne tient parfois qu’à un fil… écoutez votre cœur et pensez à votre entourage.
Protégez -les…
Par Martine Coffre-Miron